En février 2020, Klap a accompagné avec Moaï, l’Unir, un Think Tank autour de la mobilité. Le brief : organiser un hackathon d’une journée et demie avec 30 participants autour des problématiques liées à la circulation des véhicules autonomes en termes de sécurité routière.
Étonnant ? C’est vrai que la circulation des engins sans conducteur sur la voie publique, sans relever de la science fiction, n’est aujourd’hui pas une réalité ! Et tel est l’enjeu de ce hackathon : réussir à innover et à proposer des solutions concrètes et tangibles sur un sujet de départ encore hypothétique. C’est ce qu’on appelle le design fiction !
Emballés ? Sceptiques ? Suivez-nous, on vous ouvre les coulisses de ce challenge passionnant…
Le cadrage : pilier d’un atelier bien mené !
À l’origine de ce challenge, l’envie de proposer une réflexion autour du véhicule autonome, de co-penser la mobilité partagée, bref de réinventer la sécurité routière de demain. Un sujet complexe, qu’il a fallu déblayer bien avant le début du hackathon…
La core team, composée de 3 personnes de l’UNIR, 2 personnes du cabinet d’étude Moaï et Vincent, facilitateur chez Klap, a donc commencé par un Atelier Chapeau pour préciser le sujet en problématiques précises et propices à être challengées grâce au Design Thinking.
Premier obstacle : situer l’utilisateur ! Dans un challenge fondé sur du spéculatif, les participants peuvent avoir du mal à se représenter la situation et à partir du point de vue d’un utilisateur… qui n’existe pas encore ! Travailler sur une hypothèse futuriste, qu’elle soit proche ou lointaine, demande donc de bien exposer le contexte en amont, au risque de voir des participants confus partir dans tous les sens en phase d’idéation.
La démarche de cadrage a donc commencé par la définition de l’univers fictionnel dans lequel s’inscrivait le challenge. L’hypothèse : des véhicules autonomes circuleront un jour dans l’espace public. Détachons-nous pour l’instant de la réalité : l’objectif n’est pas d’imaginer quand, comment, dans quel contexte cela pourrait arriver. Si l’on visualise la situation en place, c’est sur la question du partage de l’espace public que l’on veut se pencher.
À ce stade, le challenge s’éclaircit et des mots précis sont posés pour le définir :
« Nous cherchons des idées de signalisation multi-sensorielle pour organiser, fluidifier et sécuriser notre futur espace de mobilité partagée incluant des engins sans conducteur. »
Pour concrétiser et préciser ce cadrage, la core team se lance dans une phase d’immersion préalable au hackathon. L’objectif : créer des personae, des usagers de la route, pour penser le contexte de leur relation avec des véhicules autonomes.
Nous avons donc défini 5 cas d’usages différents et précis basés sur un usager fictif. Nous avons déterminé qui ils étaient, leur quotidien, leurs craintes, leurs besoins en matières de signalisation, les questions qu’ils se posaient…
Cette deuxième étape du cadrage a permis la définition de territoires d’opportunités à partir de problématiques concrètes et précises, afin que l’ensemble des participants visualisent bien la délimitation du sujet et restent pertinents dans leur idéation.
Dernière étape de ce cadrage crucial, la consolidation de ce travail de délimitation par une phase d’immersion approfondie menée par le cabinet d’étude Moaï. L’objectif : mieux comprendre le sujet et le travailler en profondeur pour identifier les problématiques pertinentes et les questions à se poser.
Si le cadrage est une étape nécessaire et indispensable à tout atelier de Design Thinking, la complexité du sujet et sa dimension fictionnelle ont fait de cette étape un véritable enjeu pour la suite de ce challenge. Nos trois étapes ont ainsi permis la cristallisation de plusieurs chantiers de réflexion pour le hackathon. Ces persona, ancrés dans la réalité, vont aider les participants à s’approprier rapidement le sujet.
Lancement du hackathon : plonger les participants dans l’univers du challenge
Les participants du hackathon ne se connaissent pas et ne sont pas forcément familiarisés avec l’expérience et la méthode du Design Thinking. Nous avons donc commencé par une phase d’introduction solide par les différents acteurs de la core team pour bien poser les bases du sujet. Une fois les participants départagés en 5 groupes correspondant au 5 personae préparés en amont, nous avons lancé un rapide icebreaker sur le thème du blason d’équipe afin qu’ils puissent apprendre à se connaître et se réunir autour de valeurs communes.
Nous avons ensuite posé le cadre du hackathon à travers plusieurs points clés :
Qu’est-ce que la solution devra être et ne devra pas être
La définition du succès
La définition des livrables (prototypes avancés de nouveaux concepts de signalisation répondant aux différents cas d’usage définis en amont du hackathon, dossier projet et pitch filmés présentant la solution prototypée)
La définition de “l’après” (que va-t-on faire de la matière créée post-atelier : infographie synthétique et récap de l’événement en ligne)
Pour lancer la journée, nous avons commencé par une phase d’immersion rapide. L’objectif : demander aux participants de retranscrire les problématiques de leurs cas d’usages et ce qu’ils en ont compris dans un format original et concret. Pour cela, ils ont mis en scène le contexte de leurs cas d’usage à l’aide d’un plateau de Lego.
Cette phase a permis de s’assurer que les participants comprennent le sujet et s’approprient les informations transmises dans les cas d’usages. À travers la mise en commun de ces matérialisations, chacun a pu cerner les problématiques de chaque groupe, bien distinctes malgré un sujet commun, et visualiser plus précisément le cadre de son propre challenge.
Générer des propositions de valeur : le pari de la double phase d’idéation
Nous avons fait le pari de prévoir deux grandes phases d’idéation pour prendre le temps de s’immerger dans le sujet et d’aller au fond des choses avant de se lancer dans le prototypage, à travers des moments successifs de divergence et de convergence. L’objectif : s’assurer que les idées soient les bonnes, mais aussi qu’elles soient bien différentes les unes des autres pour obtenir un maximum de valeur à la fin de l’événement.
Au cours de la première journée, nous avons mobilisé la posture créative des participants en créant une atmosphère propice à l’idéation à travers plusieurs étapes.
Étape #1 : l’idéation individuelle
Cette étape est une mise en confiance pour les participants, qui permet de sortir toutes les idées que chacun peut avoir à l’intérieur de soi, et surtout de se rendre compte que l’on est tous capable de trouver des idées, d’aller chercher tout ce que l’on peut avoir en tête.
Étape #2 : l’inspiration
Nous avons réalisé un Innovation landscape sous la forme de posters inspirants s’ouvrant sur d’autres cultures, d’autres secteurs, d’autres environnements afin d’ouvrir le champ des possibles au maximum et de créer un référentiel mental des idées.
Étape #3 : l’idéation contrainte
Le groupe entier propose une ou plusieurs idées supplémentaires, pour sortir encore plus loin, aller chercher des idées de manière un peu plus large. Il en ressort des idées plus étoffées, les participants réalisent la force du groupe et le pouvoir de la co-création.
Étape #4 : le tri des idées
Nous avons utilisé la matrice « Machine à laver / Poubelle / Trésors » afin que chacun se rende compte de la valeur des idées générées :
Dans la case « trésors », des idées intéressantes, mais qui ne sont pas forcément les bonnes à travailler dans le contexte du hackathon ;
Dans la case « poubelle », des idées parfois amusantes mais peu faisables, sans réelle proposition de valeur pour l’utilisateur, voire trop loin du champ d’action défini au départ ;
Dans la case « machine à laver » : bonnes idées, avec du potentiel, qui ont besoin d’être retravaillées, tourner dans plusieurs directions pour en sortir des idées avec une vraie valeur ajoutée.
Étape #5 : le pré-prototypage
Chacun des groupes a ensuite sélectionné 3 idées dans cette dernière catégorie. Nous avons finalement challengé ces idées en proposant aux participants de créer des affiches publicitaires (facebook ad) pour formuler clairement la proposition de valeur pour l’utilisateur. Cette phase a permis de consolider les idées et de mettre d’accord l’ensemble du groupe sur les objets de réflexion en détaillant leurs points clés.
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Cette dernière étape a marqué la fin de la première journée du hackathon. Les participants ont pu dormir sur leurs idées pour les digérer et repartir dans une phase d’idéation dès le lendemain ! L’objectif de cette deuxième phase : bousculer les idées de la veille pour les pousser encore plus loin et maximiser leur valeur.
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Étape #6 : l’outil SCAMPER
Nous avons donc fait le choix de la réouverture d’une phase de divergence pour bousculer les idées sélectionnées la veille. L’outil SCAMPER (acronyme) permet de tirer les idées dans plusieurs directions en se posant plusieurs questions ouvertes : qu’est-ce que l’on pourrait substituer ? Avec quoi combiner notre idée ? Avec quoi l’adapter ? La modifier ? Peut-on proposer des choses nouvelles ? Réorganiser des paramètres ?
Étape #7 : le Pitch Pong
Pour contrebalancer les idées de chaque groupe, nous nous sommes inspirés du concept du speed dating. Le principe : présenter son idée à un participant d’un autre groupe pendant 3 minutes, récupérer ses feedbacks pendant 2 minutes, puis inverser les rôles. Cette étape permet de tirer les idées vers le haut grâce aux ressentis de personnes extérieures, tout en s’inspirant des angles d’attaque utilisés par les autres groupes.
Étape #8 : la convergence
Chaque groupe prend le temps d’observer ses trois idées différentes avec les feedbacks récoltés puis choisit l’idée qui sera prototypée. À ce stade, la core team accompagne ce choix pour s’assurer que nous avons bien cinq idées différentes et à forte valeur, pour proposer cinq livrables solides et variés à la fin du hackathon.
La dernière ligne droite : prototypage, test et itération
Passage obligé du Design Thinking, chaque groupe prototype son idée afin de la rendre concrète et tangible. Cette phase permet des ajustements, car elle demande au groupe de se mettre d’accord sur les paramètres et de formuler clairement son concept pour lui donner vie.
Nous avons ensuite emmené nos prototypes dans la rue, à la rencontre directe des usagers de la voie publique. Cette mise en situation et les interactions générées ont permis aux groupes de se projeter et de récupérer de nouveaux feedbacks.
De retour dans les locaux, les groupes réajustent leurs solutions à partir de l’ensemble des informations récoltées dans la journée. La constitution d’un dossier projet participe à la consolidation et à la finalisation de la proposition de valeur.
Dernière étape, chaque groupe propose un pitch soumis au vote du public. Ici, pas de prix ou d’idée « gagnante » qui serait réalisée dans la foulée. Cette phase ludique permet donc de conclure le hackathon dans la bienveillance, grâce à une petite mise en concurrence !
Exploiter la matière créée post-atelier : montrer l’utilité du design fiction
Une fois arrivés au terme de ce hackathon, la création de matière ne part bien sûr pas à la poubelle ! Dans notre cas, cet atelier a pour objectif de donner des pistes prospectives aux différentes acteurs du monde du véhicule autonome. Le Think Tank Unir a donc consolidé les propositions dans un guide, (le livrable final), pour inspirer des potentialités autour de ce sujet.
Et pour les participants ? Klap a créé un mini-site rassemblant tous les éléments de l’événement : vidéo récapitulative, slides utilisées pour présenter les différents temps, dossiers projets, pitchs filmés… bref un ensemble de matière pour continuer à s’inspirer une fois l’expérience terminée !
Découvrez ici le retour sur l’événement par Vincent, facilitateur sur le projet !
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Ce cas d’usage montre bien l’utilité et les perspectives passionnantes du Design Thinking appliqué au futur (découvrez d’autres cas ici). Ici, il a permis de faire la part belle à l’idéation et d’ouvrir le champ des possibles de manière très large ! Une expérience enrichissante, que nous ne manquerons pas de renouveler…